Congo : pour les travailleuses du sexe, un client qui « double la mise » peut signifier « sans préservatif »
La prostitution, considérée comme le plus vieux métier du monde est une profession libérale exercée par bon nombre des filles et des femmes dont l’âge varie très souvent entre 13ans et 42ans, qui trouvent par là l’occasion de gagner d’une manière ou d’une autre leur vie ; comme tout individu qui peut être libre de choisir tel ou tel travail ou métier en fonction des avantages ou bénéfices qu’il pense tirer dans celui-ci.
Ce métier, de par sa définition ; nous permet de dire qu’il n’a pas de limite ou de frontière puisqu’il est le plus vieux de tous les métiers ; et donc se pratique dans presque tous les pays du monde.
Dans certains pays, ce métier est réglementé par des lois et des textes juridico-législatifs, question de pouvoir lui donner un sens professionnel et de respecter le choix de celles qui l’ont choisi comme activité à revenu journalier ou mensuel. Qui sait peut –être que dans ces pays, ce métier, en le rendant officiel, désormais il pourra générer des bénéfices à ces états à travers des taxes des impôts que l’état pourra infliger aux travailleurs du dit secteur ; car considéré comme une activité à caractère commerciale.
A Pointe-Noire au Congo/Brazzaville, les travailleuses ou professionnelles du sexe sont répandus dans plusieurs quartiers de la ville en des lieux et zones précis. Ce qui explique la catégorisation des travailleuses du sexe en fonction des lieux et conditions où on les retrouve. Ce métier qui longtemps était considéré comme un métier de la honte, vu notre culture et l’influence de la religion était surtout réservé aux filles et femmes ressortissantes de la RDC qui ne venaient ici que pour l’exercer à caractère commercial, mais de nos jours, il a atteint des proportions très élevées à Pointe-Noire depuis les conflits socio-politiques (guerre civile) qu’a connu le Congo entre 1993 et 2002. Ces conflits qui ont occasionné des déplacements multiples des populations dans tout le Congo, constituent l’un des facteurs important de la croissance de la prostitution chez les filles basées à Pointe-noire.
En écoutant quelques filles qui travaillent dans ce secteur, on peut retenir qu’elles ne sont pas nombreuses à avoir choisi la prostitution comme métier ou profession afin qu’elles soient appelés professionnelles ou travailleuses du sexe comme on les qualifie ; mais plutôt en fonction de plusieurs raisons surtout liées à la pauvreté, aux charges, aux malentendus entre elles et les parents, à l’oisiveté et au manque de boulot ou de niveau intellectuel; ces filles pratiquent ce métier comme un véritable palliatif. Elles sont prêtes d’arrêter cette profession dés qu’une autre voie peut s’ouvrir à elles.
Nombreuses parmi les ex-travailleuses du sexe qui ont fini par arrêter soit parce qu’elle ont trouvé mieux ailleurs ou soit par le poids de l’âge, des grands enfants et des maladies. Elles sont devenus des véritables conseillères aujourd’hui pour demander à celles qui sont encore dans ce métier ou celles qui veulent ou viennent de se lancer de pouvoir arrêter. Il faut arrêter plus tôt car les conséquences sont nombreuses disent-elles ; vous êtes appelé à devenir des femmes au mariage et des mamans pourquoi pas.
D’autres par contre nous font état bien entendu de leur volonté de faire de la prostitution une profession, car elles ont jugé cela comme principale activité de revenu. Suivez les impressions de Francine, une prostituée rencontrée en plein service « Je mange et je règle toutes mes situations sociales à base de ça ; je viens de m’acheter une parcelle avec, et comment ne pas l’appeler profession dés lors qu’elle me génère des bénéfices comme d’autres métiers. Je me moque parfois de certains hommes et femmes qui travaillent dans un autre secteur toute la journée sans parfois gagner 5000F CFA par jour ; il est important de bien faire le choix de son métier. Le mien ne me prend pas toute la journée, mais me génère assez des bénéfices, quoi que parfois ça ne marche pas comme nous le souhaitons ».
Il faut reconnaître que la pauvreté constitue une véritable cause de motivation de ces filles vers le travail du sexe, car nombreuses sont les filles qui vivent dans des conditions très misérables dans leurs foyers respectifs et ne supportent pas cela comme étant parfois une période de la vie qui peut changer. Elles choisissent la prostitution comme un moyen, pour trouver le minimum pour assurer leur vie. Certains de leurs clients disent que ces filles transportent sur elles des magasins que peut leur générer des bénéfices. Ces filles ne sont pas parfois connues dans leurs milieux respectifs comme des travailleuses du sexe car, elles ne travaillent que la nuit et souvent loin de leurs lieux d’habitation. Elles sont âgées entre 13ans et 30ans. En écoutant l’une d’elles ; 10.000f CFA reste très souvent le plus grand montant plus sollicité avoir par nuit. Cela va de paire avec les milieux où elles travaillent, le montant varie entre 1000 F CFA et 3000F CFA par passe dans des zones plus reculées et de 5000Fcfa à 10.000Fcfa au centre ville, mais parfois elles vont jusqu’à 1000F CFA si l’heure de se retirer du milieu arrive sans pour autant qu’elle ait reçu une proposition plus concrètes.
Il existe plusieurs formes des prostituées, en fonction de leurs lieux de service, de leurs beautés, du niveau intellectuel, des raisons pour lesquelles on en fait partie et des partenaires qui côtoient ces filles. Nous pouvons par exemple vous dire qu’il existe à Pointe-Noire des lieux de travail où, les filles qui peuvent y travailler doivent être âgées que de 13 à 16ans ; pas plus pas moins. Et d’autres où le niveau intellectuel reste le critère de sélection.
Mais ces filles dans l’exercice de leur métier ne rencontre pas seulement que des roses, car elles sont très souvent confrontées aux problèmes de violation flagrante de leurs droits humains. Elles sont véritablement marginalisées dans l’exercice de leur métier.
Ces filles ne peuvent pas exercer librement leur métier car, il n’est pas du tout bien vu par l’entourage qui pense que ce métier constitue jusqu’à preuve de contraire une dépravation des mœurs et un métier de la honte. Ce qui crée des frustrations énormes chez ces filles dés que les parents et l’entourage sont officiellement informés de leur statut. Elle ne bénéficie pas le droit de vivre dans un environnement sain et propre et ne sont pas libre dans l’exercice de leur métier.
Elles font l’objet de discrimination et de stigmatisation dans la société ; pas de droit à la vie privée. Quoi que moralement et psychologiquement elles touchées ; mais il n’y a pas que ça. Le pire encore c’est que, ces filles mangent véritablement à la sueur de leur front comme on le dit souvent. Utilisés comme des instruments de plaisir par leurs clients, ces travailleuses du sexe subissent parfois des exactions terribles de la part des hommes qui les fréquentent. Elles sont nombreuses à avoir été battu par leurs clients si celles-ci n’arrivent pas à faire leur volonté. Les hommes se disent qu’après avoir payé l’argent, la fille doit être à mesure de supporter toutes les formes d’exploitation sexuelle que l’homme voudra en faire.
Beaucoup des filles nous ont expliqué qu’elles sont parfois surprises de constater la présence de plusieurs hommes lors des rapports sexuels alors qu’elles ont été contactées et payées pour servir un homme seulement. Ce qui fait que désormais ces travailleuses du sexe n’acceptent plus sortir du cadre de travail auquel elle se trouve, puisqu’elle juge ce lieu comme légal et plus sécurisant par la présence des gardes qui travaillent en complicité avec elles. Elles sont également nombreuses à être exploitées sans parfois être payées par leurs clients qui les menacent très souvent en retour.
Les violences leur surgissent également lorsque la police organise des opérations de déguerpissement c’est-à-dire que ; la police connaissant leurs lieux de service (qui sont souvent des bars dancing, des boites de nuit, des restaurant, des hôtels,…) passe les chasser. Certaines d’entre elles sont conduites dans des commissariats pour être rançonnées, battues et violées par ces policiers qui ne lancent aucune procédure judiciaire à leur égard. Elles sont parfois accusées d’être des trafiquantes ou complice trafiquants des drogues, surtout pour celles qui ont choisi pour clients, les expatriés.
Dans les commissariats, ces filles ont du mal à porter plainte quand elles ont été violentées ou exploitées par des clients véreux. Car dans ces commissariats, on trouve leur exploitation comme normale.
A l’hôpital, ces filles ne bénéficient pas des mêmes traitements si l’on découvre qu’elles sont travailleuses du sexe, surtout concernant les maladies sexuellement transmissibles comme le VIH/Sida. Lors des accouchements ces filles font l’objet de beaucoup de discrimination, elles sont craintes totalement. Lors des contacts sexuels, nombreuses sont des filles qui ont du mal à négocier l’utilisation d’un préservatif, car subissant l’influence de leurs clients qui souvent double la mise et les oblige aux rapports sexuels sans préservatifs.
Nous pouvons dire de façon spécifique que, comme toutes les autres femmes, les travailleuses du sexe subissent pratiquement les mêmes cas de violences. Le manque de connaissances de leurs droits humains oblige ces femmes à accepter parfois certaines formes de violences comme normales ou naturelles, surtout que travaillant dans ce secteur considéré de la honte. Les travailleuses de sexe se culpabilisent chaque fois qu’elles sont victime d’une violence dans l’exercice de leur métier, ce qui crée la peur et la douleur au cœur. Elles ont du mal bien entendu à se défendre et surtout défendre leurs droits. Comme nous venons de le signaler plus haut ; le fait que ce métier ne soit pas officiellement légalisé dans notre pays, la lutte contre les violences à l’égard des travailleuses du sexe constitue une autre forme de lutte parce que ce métier est tabou.
En conclusion, l’avancée significative de la croissance de la prostitution dans notre ville qui a atteint un niveau très élevé depuis quelques années ; occasionnant la dépravation des mœurs, le taux très élevé des cas du sida chez les jeunes filles doit tous à quelque niveau que ce soit nous interpeller. Faut-il réglementer ce métier en lui donnant un statut officiel ou il serait important de continuer à conscientiser les filles afin d’abandonner ce métier et adopter un comportement sexuel responsable ? la question reste posée car dés lors que certaines personnes qui prennent des décisions en la matière ne sont pas parfois directement inquiétées par la question ou sinon parfois, utilisent ces mêmes femmes quand il s’agit de se défouler disent –elles.
En plus l’absence des lois spécifiques à la question de la prostitution et des violences à l’égard des femmes entrave la mise en application des droits des professionnelles du sexe.
Herman Malanda
CJESS
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